Usage de la méthamphétamine à la hausse : collaboration nécessaire de la collectivité mars 2, 2020 Dre Heather Logan, médecin, Services de traitement des dépendances et de santé mentale, région de Fredericton La dépendance est une maladie complexe qui peut avoir diverses causes. Le traitement des troubles de l’usage d’une substance est le plus efficace lorsque des spécialistes de diverses disciplines participent au traitement des patients, selon la substance de choix. Ces patients présentent souvent des troubles de santé mentale existants et des traumatismes antérieurs importants. Ils doivent donc obtenir un diagnostic adéquat et être traités de façon à appuyer un rétablissement efficace. Je travaille à temps plein aux Services de traitement des dépendances et de santé mentale depuis 2008. Mon travail avec les patients qui sont aux prises avec des troubles de l’usage d’une substance est grandement enrichissant. Les patients sont résilients. Je suis heureuse de voir que bon nombre d’entre eux se rétablissent et poursuivent des études, trouvent un emploi stable et obtiennent un logement stable. Nous travaillons également avec des personnes qui éprouvent des difficultés et qui se heurtent à de nombreux obstacles au sein de notre système de santé actuel. Il y a environ trois ans, nous ne voyions pas beaucoup de cas liés à l’usage de la méthamphétamine ici, à Fredericton. L’usage de la méthamphétamine a augmenté de façon constante au cours des trois dernières années et a posé des défis de taille en matière de traitement. Les patients qui présentent une intoxication aiguë peuvent devenir agressifs et violents. Il est important d’assurer la sécurité des membres du personnel qui travaillent avec ces patients et de fournir un endroit sécuritaire et calme afin d’aider à réduire l’agitation chez ces patients. Près de 30 % des usagers de méthamphétamine développent une psychose causée par la drogue. Dans la plupart des cas, les patients se rétablissent d’une psychose dans la semaine suivant l’arrêt de la consommation de la drogue. Il existe des pratiques exemplaires en matière de traitement des patients qui présentent une intoxication aiguë à la méthamphétamine et une psychose causée par la drogue. Malheureusement, l’efficacité des médicaments éprouvés dans le traitement du trouble de l’usage de la méthamphétamine reste floue. Il s’agit d’un domaine de recherche actif où bon nombre de stimulants sur ordonnance sont étudiés, mais aucun traitement pharmacologique n’a connu un succès retentissant dans le but d’aider les usagers à arrêter de consommer cette substance très addictive. Les usagers de la méthamphétamine ont tendance à être imprévisibles et désorganisés. Il est possible qu’ils ne sachent plus la date ou l’heure. Il est donc très difficile pour eux de se présenter à des rendez-vous, pour une séance de counseling, par exemple. Des services d’approche sont nécessaires afin de réellement répondre aux besoins de cette population de patients marginalisée. À l’heure actuelle, les organismes à but non lucratif font un meilleur travail dans ce domaine, et avec peu de ressources. Il est essentiel pour les usagers de la méthamphétamine d’avoir accès à un traitement dès que possible. Plus l’usage de cette drogue est prolongé, moins grandes sont les chances d’un rétablissement complet du cerveau. Lorsque les usagers de méthamphétamine cessent de consommer cette drogue, ils peuvent souffrir de fatigue profonde et de dépression. Il est difficile pour eux d’accomplir des tâches fondamentales. Ils décrivent leur cerveau comme étant en bouillie et leur mémoire comme n’étant pas très bonne. Les Services de traitement des dépendances et de santé mentale n’existent pas dans une bulle. La bureaucratie est le plus grand obstacle au traitement des patients aux prises avec des troubles de l’usage d’une substance. S’attaquer à l’usage de la méthamphétamine dans nos collectivités demande une coopération entre les partenaires communautaires, notamment les Services de traitement des dépendances et de santé mentale, le ministère du Développement social, la Sécurité publique, les services policiers locaux, les établissements de soins de courte durée, les organismes communautaires sans but lucratif (p. ex. Groupe d’action communautaire sur l’itinérance), les refuges d’urgence et SIDA NB, pour n’en nommer que quelques-uns. Les déterminants sociaux de la santé peuvent avoir un impact important sur le rétablissement des patients. Ces facteurs comprennent entre autres le revenu, l’éducation, la culture, l’hygiène et les réseaux de soutien. Les patients qui consomment de la méthamphétamine et qui réussissent à arrêter d’en prendre ont besoin d’un soutien considérable. Les patients qui ne font pas de rechute ont habituellement un logement stable et la capacité de payer leurs médicaments. C’est incroyablement frustrant de traiter des patients aux prises avec des troubles de l’usage d’une substance lorsqu’ils n’ont pas accès aux médicaments dont ils ont besoin pour appuyer leur rétablissement. Il est également important de reconnaître que peu importe le nombre de lits de rétablissement que nous créons dans la province, donner son congé à une personne à la rue, sans plan de congé et sans accès à un logement sécuritaire, entraîne ultimement dans la grande majorité des cas une reprise de l’usage de la drogue. Évidemment, au Nouveau-Brunswick, nos ressources sont limitées et toute amélioration au système peut être difficile à mettre en œuvre en raison des coûts. Manquer au traitement adéquat de ces personnes peut également entraîner des coûts importants, notamment des coûts au système de justice pénale et au sein du système de soins de santé même. Le coût d’une prescription mensuelle pour un patient est beaucoup plus faible que le coût d’une admission d’une nuit à l’hôpital. Sans régler ces problèmes, les patients continueront de souffrir et, ultimement, nos collectivités seront de moins en moins sécuritaires. Tous les ordres de gouvernement doivent collaborer pour veiller à ce que les besoins de base soient offerts aux populations vulnérables. La Dre Heather Logan est médecin à temps plein aux Services de traitement des dépendances et de santé mentale à Fredericton depuis 2008. Elle peut prescrire de la méthadone depuis 2006. Elle a obtenu son diplôme de la Dalhousie University Medical School en 2001. Elle s’intéresse tout particulièrement à l’abandon du tabac, à l’interrelation entre le traumatisme et la consommation abusive de substance et au traitement des troubles concomitants. Elle détient un Certificat de compétence additionnelle en médecine des toxicomanies du Collège des médecins de famille du Canada.